Rien en travers de mon chemin

Chant 1.
Le Sol.

Nous l’appelions le Sol.
Parfois, par deux ou trois, nous y descendions ensemble pour apprendre
qu’il n’y a pas de gravité.
Il était cependant moins risqué d’y aller seul
dans le plus grand secret
pour éprouver chacun sa propre peur
que de se rendre à plusieurs dans la Cabane Noire.
Après des heures de pur inconnu personnel
je reparaissais devant ma mère le visage empreint d’une
innocence de fond du ciel : celle que savent feindre les enfants.
Le Sol !
Sur ce réconfort puissant régnaient des poussées immenses
dont nul ne pouvait éprouver jusqu’au bout le voûtement.
La solidité impressionnante d’une membrane de fruit
y servait de pays.
Nous étions plus près, ici, des portes défoncées et vieilles
des presles, des acacias et de la liane sèche qui avec ferveur
serrent le petit loquet rouillé qui ne fait pas exprès de crier :
Enfance !