Pour Yves Noblet.
Peindre, et précisément peindre d’après nature, peindre sur le motif, ce n’est au fond qu’obéir à une nécessité, ou plutôt c’est prendre toutes les dispositions pour se mettre en l’état d’obéir à cette nécessité, de s’y mesurer, de s’y dépasser peut-être, et de s’y oublier sûrement.
« Obéir à une nécessité », pour le peintre, c’est d’abord se plier à cette obligation de peindre comme on respire, c’est ne pas esquiver le rapport à ce monde visible qui le premier interroge la sensibilité, c’est ne pas éviter son incessante confrontation, c’est la rechercher même et, au-delà de la chose vue, la trouver parfois jusque dans celle que la mémoire lui rend ; c’est ne jamais se contenter des affirmations de l’intelligence à sa question toujours renouvelée et croire enfin qu’il n’est pas de solution, mais un chemin et que le parcourir est le haut risque qu’il nous est donné de vivre.
« Obéir », c’est continuer ce chemin déjà couru par d’autres ; c’est se reconnaître une filiation, une lignée, une fidélité, c’est citer des maîtres, et, loin des attitudes de rupture et des postures formelles, rester attentif à leur leçon, et bien plus attentif encore à la leçon de la grande présence visible du réel que dit ici le mot « nécessité ».