Une loggia, un lieu ouvert.
I.
« Je ne peux pas, non, je ne peux pas m’enfermer comme ça dans un livre pendant des heures. » Se prenant tout de go la tête à deux mains pour la serrer comme dans un étau, ce jeune homme à qui j’étais censé donner le goût de la lecture, comment, par son refus exprimé avec une telle vivacité, put-il éveiller en moi, secrètement, un élan de sympathie ? Tant de choses, heureuses ou non, de menus événements, tant de sollicitations par quoi, même n’y prenant pas garde, on se sent rattaché à l’existence et qu’il faudrait tenir à l’écart, comme qui aurait à faire le mort.
Littéralement, plonger dans la prose. Rivé au fil de l’intrigue, captivé — captif —, le lecteur de romans s’engouffre, oublieux de l’heure, de tout ce qui l’entoure, oublieux des autres autant que de lui-même que, provisoirement, il perd de vue. N’est-ce pas ce qu’il désirait, le sût-il ou non, ce dont il ressentait le besoin ? Sa claustration lui est délivrance. Pour un temps — mais le temps ne compte plus — il ne vit plus, ne demande plus à vivre que par procuration.