AUTOBIOGRAPHIE D’UNE IDÉE

 

L’idée et la parole de Louis Sullivan.

 

Louis Sullivan’s message was to develop
individual styles of architecture not derived
from past architecture.

Paul Sprague.

1. Le message de Sullivan.

It is much easier to point out the faults and errors in the work of a great mind than to give a distinct and full exposition of its value1. Peut-être Louis H. Sullivan a-t-il lu, et conserva à l’esprit cette phrase de Schopenhauer, un de ses auteurs favoris ainsi traduit dans l’édition bostonienne de 1887. Quoi qu’il en soit, nombre de ses commen-tateurs semblent ici désignés.

Sullivan, qui vécut de 1856 à 1924, fut le chef de l’école de Chicago, architecte et auteur de divers textes et livres. Parmi ses livres, le dernier est The Autobiography of an Idea2. Parmi ses autres textes, The Tall Office Building Artistically Considered3, de 1896, est le plus connu et sans doute le plus important. Il comprend la formule de l’idée qui don-nera son titre à l’Autobiography et qui, plus encore que ses projets, res-tera attachée au nom de Sullivan : la forme suit la fonction.

Cet énoncé résonne au tréfonds de la pensée de l’architecte moderne, entêtant, mais le plus souvent considéré comme un pensum à ânonner, refusé ou trop évident, trop peu ramené à la conscience, trop peu inter-rogé. La formule fut bientôt honnie par la critique néo- ou post-moderne et vouée aux gémonies effrayantes des négativités de l’idéalisme. Les commentateurs français de cette période, par exemple, cherchent pour la plupart à l’excuser chez le maître américain4. Bien peu admettent en elle le principe actif du projet.