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VENISE, VILLE PATRIMOINE DE L’HUMANITÉ, splendeur unique, est en train de se dépeupler et donc de mourir .
Il semble que ce et donc ne soit pas clair pour tout le monde, ou plutôt que fort peu de gens se préoccupent de cette conséquence au plan local. La préoccupation est plus soutenue de par le monde, mais cette préoccupation à distance ne profite guère à la ville. Ville qui est une cité si elle habitée par des citoyens, si elle est avant tout un habitat humain, comme l’indique son étymologie, civitas, la même que « civilisation ». Le mot signifie existence objective d’une communauté avant de vouloir dire droits du citoyen et citoyenneté.
Structure extraordinaire conçue par l’homme pour vivre en communauté et créer des relations, du commerce, du savoir et de la connaissance, la ville n’est vivante que si ces caractéristiques se maintiennent ou s’accroissent ; une ville qui voit augmenter le nombre de ses habitants est le signe que beaucoup de gens, en la choisissant comme lieu où vivre, lui reconnaissent plus qu’à d’autres ces caractéristiques fondamentales pour la communauté et décisives pour leur propre vie.
Une ville qui perd des habitants révèle l’absence de ces conditions, et signale qu’on perçoit l’effacement de l’ensemble de caractéristiques qu’on appelle « qualité de la vie » et qu’on cherche des alternatives.
Alors que le monde est en train de s’urbaniser, avec des métropoles et des mégalopoles à croissance exponentielle en surface et en population, la ville-la-plus-belle-du-monde ne cesse de perdre des habitants.
Alors que des millions de personnes vont s’établir dans des villes toujours plus grandes, souvent inhospitalières, polluées et engorgées, et que des savants et des experts de divers continents étudient comment recréer de l’humanité dans ces post-métropoles2, un millier de personnes environ quittent chaque année Venise, renonçant à vivre dans l’une des structures urbaines les plus extraordinaires de la planète, centrée sur l’homme et construite à la mesure de l’homme.
Au lieu d’attirer les habitants, Venise les éloigne. Quelles sont les raisons de ce paradoxe ?
Pourquoi l’administration communale et les citoyens de Venise donnent-ils l’impression de ne pas se soucier de ce phénomène, et se contentent-ils de l’enregistrer comme s’il s’agissait d’un événement inévitable ? Pourquoi vont-ils même jusqu’à le soutenir de leur action? Quels sont les valeurs et les choix capables de s’opposer à une tendance qui paraît aujourd’hui inéluctable et irréversible ?